A Dieu père Jean Jabouley
Mot pour messe d’à Dieu d’oncle Jean
Cher oncle Jean, Jean l’abbé, comme nous disions pour vous différencier de votre beau-frère…
Vous êtes arrivé sur terre en juillet 1926 avec, attaché à votre date de naissance, un petit différend entre vos parents. Bonne maman vous disait né le 30 juillet tandis que bon papa vous avait déclaré né le 31 juillet. Cette dernière date, l’officielle est celle qui a prévalu sauf dans l’intimité familiale, bonne maman tenant à vous fêter votre anniversaire le 30. Cela vous amusait et vous pensiez qu’entre la mémoire d’une mère qui met au monde son enfant et le tempérament distrait et peu porté sur les tracasseries administrative d’un père, la probabilité que vous soyez né le 30 était plus forte.
Au bout de 93 ans d’existence, un jour ne compte pas, pas plus qu’il ne comptera dans l’éternité.
Ces 93 ans ont été bien remplis, notamment par 66 ans de ministère qui vous ont menés à Ste Marie de la Guillotière, Ste Blandine, à l’aumônerie de l’école des métiers et des industries métallurgiques de Lyon boulevard des Tchécoslovaques et celle de la fondation Richard puis à la création de celle d’un lycée technique. Vous avez également exercé dans la paroisse des Essarts à Bron, période à laquelle vous avez eu charge de famille, ce à quoi votre fonction ne vous prédestinait pas. En effet vous avez gardé 3 enfants africains chez vous. Les quelques semaines ou mois que devait durer cette aide se sont transformés en quelques années. Vous avez passé également quelques années à Craponne puis au monastère de la Visitation Vaugneray où la famille se réunissait les 1er janvier.
Une vie bien remplie consacrée à servir votre prochain et Dieu par des actes mais aussi par la méditation et par de très nombreuses et très riches lectures.
Nous avions ces dernières années quelques échanges presque philosophiques, ponctués de rires car nous nous amusions à regarder quelques bizarreries de l’existence ou de l’âme humaine avec un peu d’humour. Echanges trop peu nombreux sans doute mais que j’appréciais.
Votre retraite à l’Accueil des Buers n’en était pas une. Vous ne vous êtes nullement coupé du monde, au contraire. Vous étiez encore très sollicité, pour les messes dans cette chapelle, pour des rencontres pour travailler, réfléchir, enseigner. Votre santé déclinant, vous avez petit à petit perdu votre autonomie mais vous laissiez cependant volontiers emmener à droite et à gauche par vos amis et connaissances très nombreux.
Le plus difficile aura été la perte de la vue : cela signifiait surtout pour vous ne plus avoir accès aux livres, aux textes, à la parole, aux pensées. Tous ces mois vous avez fait preuve d’un abandon remarquable même si de temps en temps le moral n’était pas bien haut et que parfois vous disiez dans un soupir « dis à tes enfants que c’est quand même dur de vieillir », j’ai pensé qu’à votre place je n’aurais pu garder ce détachement et cette confiance que vous avez très souvent manifestés. Merci pour ce bel exemple et tous les souvenirs partagés.
Ses funérailles ont été célébrées le 16 novembre 2019
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Le père Jean Jabouley, né le 31 juillet 1926, ordonné en 1953, curé à Meyzieu de 1980 à 1983 est décédé le 11 novembre 2019. C’était un prêtre simple, à l’écoute, au service des paroissiens, au plus près d’eux. Jeune, il a travaillé avec l’Ecole de métiers des industries métallurgiques et atelier-école, actuellement lycée Hector Guimard Il s’est également occupé des Handicapés à la fondation RICHARD (104 rue Laennec 69371 Lyon)
Il avait l’expérience du désert, pour y avoir vécu 1 an. A Meyzieu, il animait des groupes de prièresqui se réunissaient régulièrement et se terminaient par un repas partagé convivial. Il proposait une prière vivante, dans toutes sortes de situations, loin des formules toutes faites et répétitives. Par exemple, une ancienne catéchiste de classe de 6° garde encore un souvenir ému de la prière qu’il avait animée lors d’une retraite : les enfants l’écoutaient attentivement dans un silence recueilli et tout le monde ressentait la profondeur de cette prière commune.
Quand il a quitté Meyzieu, il est parti à Craponne et avec
Benjamin Louison, il se tenait à disposition de tous ceux qui ressentaient le besoin de prier, à la manière du Christ dans l’Evangile.
Peu de temps avant sa mort, alors qu’il était très malade et qu’il ne pouvait plus se lever, une personne de Meyzieu qui lui rendait visite lui demanda : « A quoi penses-tu ? ». Il répondit : « Je prie le Seigneur, je répète 'Jésus fils de Dieu prends pitié de moi pauvre pécheur'. » Un prêtre lui demanda : « Est-ce que ta foi a changé depuis ta maladie ? ». Il répondit : « Oui, ma foi a changé, je sens que je me suis rapproché de la source… »
Merci Jean, de nous avoir fait approcher le Jésus de l’Evangile.
Ses funérailles ont été célébrées le 16 novembre 2019 à neuf heures trente dans la chapelle des Sœurs Franciscaines du Sacré-Cœur à Villeurbanne (3 impasse des Sœurs). Accueil des Buers. Il a eu une très belle messe concélébrée par 3 prêtres.
Une dizaine de prêtres et de nombreuses personnes participaient à cette célébration. |
A la fondation Richard.
Quand j’ai connu Jean – dans les années 70/73 - il était aumônier à la Fondation Richard. Nous étions une équipe d’étudiants de l’INSA qui animions des équipes de scoutisme avec les enfants handicapés de la fondation. A cette époque, certains ne sortaient jamais dans la rue, leurs parents les cachaient. Jean, que les enfants et nous appelions Jab, venait d’être très malade et il était faible, mais il ne manquait jamais nos réunions de préparation et venait nous visiter dans les camps d’été. Il était très bienveillant avec tous, écoutait avec beaucoup de douceur les difficultés des uns ou des autres et savait célébrer pour ces enfants dont certains cumulaient les déficiences intellectuelles et
physiques, et pour nous dont la foi n’était pas toujours rayonnante …
A Meyzieu je l’ai retrouvé égal à lui-même, un homme humble, une parole vraie et une foi qui savait se dire avec un infini respect pour ses interlocuteurs. Merci Jean pour ces moments vécus avec toi.
Anne Briot
Souvenir d'un paroissien de Meyzieu.
Quelqu’un avait sonné à ma porte, c’était un témoin de Jéhovah. Habituellement les témoins de Jéhovah vont par deux ; mais ce jour-là, il n’y en avait qu’un, son condisciple avait dû sonner chez un voisin.
Il était jeune et paraissait très convaincu de sa foi. Je l’ai d’abord laissé parler, semblant l’approuver et lui faisant des réponses brèves et ouvertes. Au bout d’une bonne demi-heure, je lui tins ce langage :
« Moi aussi, je crois en Jésus-Christ et je lis très souvent la Bible avec d’autres catholiques. Tout n’est pas faux dans ce que vous dites, mais j’aimerais en discuter avec vous dans un autre cadre. Je vous propose de vous rencontrer à la cure de Meyzieu avec vos condisciples, moi de mon côté je ferai venir des catholiques ».
Après le départ du témoin de Jéhovah, je me rendis compte que j’avais été un peu présomptueux de prétendre pouvoir organiser cette réunion à la cure. Mon épouse me conseilla d’appeler immédiatement notre curé, le père Jean Jabouley. Je suivis ce
conseil, et le père Jean Jabouley se montra très aimable et pas du tout inquiet ; il me dit qu’il allait contacter des paroissiens sûrs de leur foi catholique et qu’il se chargerait d’animer la réunion.
Le jour de la réunion, il y avait une dizaine de paroissiens et environ autant de témoins de Jéhovah. Une différence cependant : parmi les catholiques il y avait à peu près autant d’hommes que de femmes tandis que les témoins de Jéhovah étaient tous des hommes ; ils craignaient peut-être de tomber dans un guet-apens. Celui qui avait sonné à ma porte était venu mais il se tint coi pendant toute la réunion.
On commença par une prière commune, puis les paroissiens de Meyzieu se mirent à poser les questions qu’ils avaient préparées ; le père Jabouley intervenait pour compléter ou reformuler chaque question, citant tel ou tel passage de la bible. Quelques témoins de Jéhovah essayèrent de répondre, mais très rapidement ce fut seulement leur chef qui prit la parole. Il nous dit qu’il était
d’accord avec nous sur presque tous les points et que, d’ailleurs, il voulait bien utiliser nos propres bibles pour la discussion. Certains s’étonnèrent, faisant remarquer que les documents des témoins de Jéhovah semblaient parfois suggérer autre chose. Le chef répondit « il ne faut pas donner de la nourriture solide à un nourrisson : lorsque les nouveaux convertis progressent dans leur foi, nous leur expliquons des choses plus difficiles à comprendre qu’au début ». Les autres témoins de Jéhovah se tenaient silencieux, peut-être pantois d’entendre ce discours.
Une fois toutes les questions épuisées, le père Jabouley proposa de terminer par une prière commune, ce qui fut fait. L’atmosphère était détendue et on se serra la main avant de se quitter.
Le lendemain, je reparlais de la réunion avec le père Jabouley. Il me dit, à propos de leur chef : « Il était très fort, c’était au moins un évêque des témoins de Jéhovah ! »
Cette rencontre, qui a marqué les paroissiens, fut un témoignage de
l’ouverture d’esprit du père Jean Jabouley.